Activité phare annuelle de la Chaire UNESCO en paysage urbain de l'Université de Montréal (CUPUM), le Workshop_atelier/terrain de Marrakech s'est déroulé avec grand succès du 25 novembre au 4 décembre 2004. Cette activité qui se tenait sur le campus de l'Université de Cadi Ayyad de Marrakech regroupait 45 étudiants de 8 institutions de 4 pays (Maroc, Liban, Italie et Canada) interpellées par l'enseignement de l'architecture de paysage. L'équipe pédagogique regroupait des professeurs de ces institutions et le pôle d'experts était principalement constitué de professeurs de l'Université de Cadi Ayyad de Marrakech et de l'Agence urbaine de Marrakech.
Sur la base d'un travail préparatoire mené par les 10 étudiants de l'École d'architecture de paysage de l'Université de Montréal, les premières journées du Workshop_atelier/terrain ont été consacrées à des visites à Marrakech et dans ses périphéries et à des conférences communiquées par des experts universitaires et des spécialistes de certaines agences gouvernementales. Cet important préambule a permis aux étudiants de saisir la problématique d'étude et les principaux enjeux de la Palmeraie (périphérie emblématique de Marrakech), de cueillir les données terrains nécessaires au projet de paysage. Cette mise en contexte a été l'occasion de former 11 équipes de travail regroupant dans chacune d'entre elle, un(e) étudiant(e)s des institutions universitaires présentes.
Localisé dans le Foyer de l'Université de Cadi Ayyad, le travail intensif d'atelier a permis dans un premier temps à d'esquisser un positionnement stratégique vis-à-vis de l'ensemble du territoire de la Palmeraie de ses enclaves dans l'espace urbain tout comme ses interfaces rurales. Cet énoncé stratégique, issu d'une analyse globale du territoire, a mené à l'identification de sites d'intervention localisée pour générer des propositions de design à diverses échelles (design urbain et scénarios d'aménagement).
Ce Workshop a livré des hypothèses d'aménagement et des projets de paysage visant la mise en valeur publique du territoire, la préservation des milieux humains et naturels et la requalification de ce haut-lieu à travers une perspective de développement durable. Au terme de cette activité de type "charrette" (réalisée et conçue entièrement sous une forme numérique), les 11 projets ont été exposés le samedi 4 décembre 2004 dans le hall d'honneur de la Mairie de Marrakech pour la tenue du jury et pour le dévoilement public de l'activité internationale.
Le jury, présidé par Mme Brigitte Colin, représentante du programme MOST de l'UNESCO (Paris), était composé Mme Jalila Kadiri du Ministère de la Culture, de M. Abderrahmane Chorfi, directeur de l'Agence urbaine de Marrakech et de M. Stefan Tischer, directeur de l'École d'architecture de paysage. Après la remise des médailles de l'UNESCO aux récipiendaires, le jury a tenu à féliciter l'ensemble des "étudiants qui ont donné le meilleur d'eux mêmes pour produire, en dépit de leur fatigue extrême et de leur diversité culturelle et disciplinaire, un éventail si riche d'idées innovantes pour la réalisation d'une stratégie durable de développement de la Palmeraie de Marrakech" (extrait de l'allocution de la présidente). L'annonce des résultats et la cérémonie de clôture se sont déroulées sous la présidence du maire de Marrakech, M. Omar El Jazouli et ont réuni plusieurs acteurs gouvernementaux de Marrakech. Tous ont mentionné l'importance de cette activité internationale unique qui offre des réflexions nouvelles et des propositions inventives pour le territoire de la Palmeraie. Les projets présentés laissent ainsi entrevoir des suivis puisque plusieurs acteurs dont la Direction de l'Agence urbaine de Marrakech ont manifesté leur volonté réelle d'étudier chacune des propositions. De l'avis de toute l'équipe pédagogique, les travaux réalisés témoignent d'une riche réflexion multidisciplinaire et d'une implication étudiante et professorale hors du commun. Cette expérience pédagogique unique a relevé plusieurs défis puisqu'elle obligeait le dialogue constant entre les participants et la mise en commun des savoir-faire (de l'architecture de paysage, de l'architecture, de l'agronomie, de la géographie et des études en tourisme), l'écoute des cultures, le partage des points de vue et bien évidemment, l'obligation de résultats tangibles.
Activité de transfert des connaissances et d'apprentissage d'une coopération internationale Nord-sud sous l'égide des programmes MOST et MAB de l'UNESCO, le Workshop_atelier/terrain aura été avant tout un laboratoire, une expérimentation quant à la mise en œuvre d'une pédagogie ancrée ("in situ") dont le but est de léguer des livrables aux collectivités locales concernées. L'essentiel des illustrations des projets réalisés dans le cadre de cette activité pédagogique se retrouvent dans la publication "Workshop Marrakech, la Palmeraie en paysages" paru le 1er novembre 2005 à la maison d'édition Les Presses de l'Université de Montréal (PUM). Cet ouvrage fait également état des enjeux d'aménagement de ce territoire emblématique.
La CUPUM et tous ses partenaires internationaux tiennent à féliciter chaleureusement ces lauréats pour leur engagement dans la mise en forme de projets innovants qui contribueront tous aux desseins de la préservation et de la mise en valeur du "paysage humanisé de la Palmeraie".
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
Préserver, pour les temps futurs, les bases du paysage vernaculaire de la palmeraie de Marrakech, qu’un urbanisme de dérogation tend aujourd’hui à détruire, telle est l’intention du présent projet. Il vise plus particulièrement le développement structuré du territoire de la palmeraie par la création d’unités de paysage, unités entendues comme étant des portions de territoire vouées à une même fonction (ex. : agricole, touristique, etc.) et présentant des qualités communes. Tel un nouveau germe pour le futur de la palmeraie, l’objectif de ce projet est d’amorcer les bases d’un développement durable qui positionne les qualités paysagères et patrimoniales comme valeurs centrales d’une stratégie concertée.
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
Ce projet considère plusieurs transformations touchant la palmeraie de Marrakech : perte de son image forte d’oasis officiant de « poumon vert » au cœur d’un milieu aride et hostile (dans les faits comme dans l’imaginaire collectif), perte de l’aspect communautaire, diminution de l’importance de la palmeraie en tant que ressource agricole, émergence d’enjeux écologiques majeurs tels que la pollution des oueds et la mort des palmiers, émergence d’un espace privatisé de luxe « réservé » à une classe sociale riche et, enfin, omniprésence du matériel minéral des nouvelles constructions qui mite le paysage et en modifie le caractère.
L’intention est simple tout en étant complexe dans sa réalisation : redonner à la palmeraie de Marrakech une identité paysagère particulière et forte tout en l’adaptant aux inévitables besoins du développement touristique en vogue sur le territoire. Ainsi sera-t-il permis à ce paysage emblématique de reconquérir sa place au cœur de la ville rouge, tant sur le plan visuel qu’économique, tout en le rendant à nouveau généreux pour les habitants locaux.
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
FORCE 3 repose sur trois figures du paysage de la palmeraie : l’agricole (à la base du développement de la palmeraie), l’oasis (figure idyllique de l’abondance et de la volupté) et le paysage aride. Dans les climats désertiques ou semi-arides, lorsque les territoires ne sont plus cultivés, comme pour certains de la palmeraie, ce n’est bien souvent pas la friche qui apparaît mais le désert qui avance et qui les ensevelit de son manteau de sable. La palmeraie de Marrakech, dans sa forme et dans son idée, serait l’amalgame et l’emboîtement de ces trois forces que le projet tente de confronter et de mettre en valeur à la fois pour les équilibrer mais aussi pour en faire un outil de sensibilisation en rendant visible leur qualité.
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
L’originalité analytique du projet réside dans la reconnaissance d’un problème de lisibilité de la palmeraie : difficulté à lire l’idée d’une palmeraie faisant figure d’abondance et de verdure en plein cœur du désert, bulle de fraîcheur dans l’aride horizontalité. C’est que, le plus souvent, le visiteur est confronté à un espace mal défi ni composé de palmiers isolés ou d’îlots de palmiers situés ici et là, seuls témoins d’un passé plus glorieux. C’est cette idée de palmeraie, dont le nom renvoie à une forme aux limites bien défi nies et un contenu plutôt dense, qui se trouve à la base de la proposition. C’est plutôt à la limite entre l’idée que l’on s’en fait et la palmeraie telle qu’elle se morcelle et se dégrade, sous l’effet des nouvelles formes d’occupation et des nouvelles pratiques de gestion, que le projet tente d’agir.
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
Alors qu’elle constituait autrefois une ceinture de verdure autour de Marrakech et une source agricole importante, la palmeraie de Marrakech est aujourd’hui en processus de fragmentation et de privatisation croissante qui en fait oublier ses origines plus communautaires et sa fonction privilégiée d’espace de divertissement et de détente pour les marrakchis. ÉCO/NO/VERDI vise avant tout à requalifier certaines des entités paysagères de la palmeraie en s’appuyant sur les forces de certaines de ses composantes.
L’objectif du schéma directeur global est la création de coulées vertes en s’appuyant sur la linéarité nord-sud des khettaras et des oueds. Ces coulées vertes, alimentées par les eaux traitées des habitations, seront susceptibles de contrôler l’expansion urbaine et de valoriser l’agriculture, les écosystèmes et les paysages de la palmeraie. La réinvention du paysage de la palmeraie par la réinterprétation des khettaras en coulées vertes permet ici d’apporter des éléments de solution à plusieurs aspects de la problématique de la palmeraie : gestion des eaux usées, insalubrité des habitats, gestion de l’eau, urbanisation anarchique et incohérence de l’espace.
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
C’est grâce au labeur et au travail des premiers habitants de la ville de Marrakech que la palmeraie, aujourd’hui considérée patrimoine identitaire, put émerger des sols arides de la plaine du Haouz. La culture des sols, le travail de la terre et l’entretien du système d’irrigation nécessaire à son existence étaient le fruit d’un travail collectif concerté qui, dans le contexte contemporain d’occupation socioéconomique et de gestion de l’eau, s’est désagrégé. L’expansion touristique, le départ des résidents des douars pour la ville et l’abandon des méthodes traditionnelles de culture et d’irrigation constituent les principaux enjeux sur lesquels se penche la stratégie territoriale développée.
Trois composantes essentielles des paysages contemporains de la palmeraie furent relevées comme pouvant, dans leur interrelations, contribuer d’une façon ou d’une autre à la préservation et à la mise en valeur publique de certains de ses caractères paysagers, voire emblématiques : le tourisme, la nature et l’agriculture. Plutôt que de vouloir éliminer l’une d’elle au profit d’une autre, la stratégie de design tente le pari de la cohabitation des usages tout en reconnaissant l’intérêt particulier des gestes et pratiques qui sont à l’origine des paysages identitaires de la palmeraie. Ce parti s’adresse donc autant aux paysages humanisés et domestiqués, valorisés à la fois en tant que composantes physicospatiales, socioéconomiques et culturelles à préserver, qu’aux paysages identitaires de la palmeraie à développer.
L’intention générale est de freiner/ralentir l’extension continue des résidences touristiques et secondaires destructrices de la palmeraie en misant sur les activités agricoles des populations locales des douars. Leur présence à l’intérieur de la palmeraie agira comme une barrière invisible au développement intensif de l’occupation touristique. Face à ces douars « gardiens » de la palmeraie, un tourisme pourra se développer en répondant à la fois aux attentes économiques et aux exigences de protection des paysages de la palmeraie.
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
Landmark, marques paysagères s’est initié à partir de l’expérience de désorientation vécue par l’équipe à l’intérieur de l’entité morcelée de la palmeraie : manque d’éléments d’orientation et d’un système d’organisation. L’expérience diffuse de la palmeraie est celle d’un territoire dont les éléments d’identité historique tombent en ruine et sèchent sous le soleil d’une histoire à cheval entre tradition et modernité.
Constatant que la dégradation des khettaras et la disparition de certaines zones caractéristiques et uniques à la palmeraie menacent son identité historique, le projet tente l’aventure de la protection de certains de ses attributs. La mise en valeur de certains éléments du paysage de la palmeraie en rehaussera l’image tout en fournissant une organisation cohérente capable d’en gérer l’échelle.
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
L’urbanisation actuelle et prévisible de la palmeraie est l’un des éléments majeurs sur laquelle la proposition se penche. Elle part du constat selon lequel la palmeraie est actuellement soumise à deux forces opposées qui la mettent en péril et qui semblent aussi vouloir caractériser son avenir : d’une part, l’exode rural qui augmente son occupation par les douars et, d’autre part, le développement de l’urbanisation et des structures d’accueil touristiques qui la grugent de manière désorganisée. La prolifération de ces implantations touristiques consommatrices d’espace et d’eau de même que l’extension, en nombre et en superficie, des douars aux conditions économiques précaires ne feront qu’amplifier les phénomènes de « douarisation » et de « disneyifi cation » de la palmeraie avec, comme corollaire, l’amplification des problèmes environnementaux, culturels et économiques qu’elle connaît déjà.
La stratégie développée repose sur une volonté de renforcer la relation paysagère « ville (bâti) – palmeraie » en proposant une nouvelle forme d’implantation du bâti sensible à la matrice historique et paysagère du territoire. La création d’interactions et d’accès publics entre la ville et la palmeraie ainsi que la valorisation d’espaces d’agriculture non intensive et leur échange avec le monde urbain sont aussi des éléments indissociables de cette nouvelle configuration territoriale. À long terme, il est espéré que cette stratégie puisse redéfinir de nouvelles relations d’occupation socioéconomique.
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
La palmeraie d’aujourd’hui est un espace désarticulé en proie à une spéculation féroce, multipliant ici et là les incohérences et les contrastes frappants. L’occupation récréotouristique et urbaine s’y déploie de plus en plus de sorte qu’on peut craindre le pire pour son intégrité future. L’intentionnalité du projet vise à rééquilibrer les rapports de forces à l’origine des clivages marquant l’espace de la palmeraie, tantôt berceau du gratin international, tantôt foyer de misère sociale.
La proposition développée tente de répondre à trois objectifs majeurs : neutraliser l’expansion urbaine dans la palmeraie, déprivatiser et ouvrir le site à la population de Marrakech et, enfin, permettre le tissage de nouveaux liens entre la ville et la palmeraie.
Plus précisément, elle développe une zone critique située à la fois à la lisière du nouveau pôle touristique grandissant et traversée par le circuit touristique existant. Comme action principale, le projet met de l’avant la requalification de certains douars existants en sites d’activités éducatives et culturelles ; les autres douars devraient être utilisés à des fi ns agricoles afin de préserver les terres arables dans la palmeraie. Pour certains d’entre eux, l’implantation d’un agro-musée coordonnera les visites de sensibilisation à travers les khettaras. Ces initiatives auraient des retombées positives sur les populations locales dans la mesure où elles entraîneraient leur participation au développement du projet communautaire et, à plus grande échelle, du projet de territoire. Enfin, des espaces satellitaires aux douars requalifiés deviendraient des aires de repos et de spectacle. Il est espéré que ces actions prototypes, dans la mesure où elles auraient fait leurs preuves, devraient évoluer progressivement jusqu’à couvrir et préserver l’ensemble du territoire.
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
« Movimento » vise la revalorisation et la protection du patrimoine naturel et humain de la palmeraie de Marrakech par l’implantation d’une nouvelle structure socioéconomique visant les échanges douars/nouvelles implantations touristiques et résidentielles. S’échelonnant en trois grandes phases et sur une temporalité d’un peu plus de 15 ans, le projet tente d’équilibrer et de faire cohabiter, dans l’espace morcelé de la palmeraie, l’agriculture, les nouvelles formes d’occupation de l’espace (tourisme et résidences secondaires) et les douars en tant que groupes humains nécessaires à la sauvegarde et à l’entretien de la palmeraie.
La Palmeraie de Marrakech
Marrakech - Marrakech - Tensift - Al Haouz (Al Maghrib)
Extrait de la proposition
Patrimonialisation et démocratisation de la palmeraie » est une réponse aux enjeux urbain, environnemental et économico-touristique qui touchent la palmeraie de Marrakech. Sur le plan urbain, si le développement peut être favorable à l’économie en procurant emplois et revenus, la surexploitation du foncier qui en résulte le plus souvent demeure une réelle menace pour la palmeraie. De fait, l’apparition de nouveaux complexes luxueux sacrifie trop souvent les terres cultivables au profit d’activités ayant des effets dévastateurs sur la conservation et la valorisation du paysage emblématique de la palmeraie. La faible accessibilité à la palmeraie est aussi constatée étant donné le mauvais état des routes ainsi que l’absence de signalisation et de moyens de transport en commun.
Sur le plan environnemental, c’est à la mauvaise gestion de la ressource aqueuse, à la dégradation des khettaras et à la dégradation des sols que le projet tente d’apporter une réponse afin de revaloriser l’agriculture. Enfin, sur le plan économico-touristique, c’est la fermeture/ cloisonnement du circuit touristique, qui profite uniquement à une certaine élite sociale, ainsi que l’occupation et le recul des terres agricoles d’antan sous l’avancée de l’occupation récréotouristique, qui sont questionnés.